|
Un rapport sur la répression cubaine contre les
journalistes indépendants
Cuba est aujourd'hui le seul pays d'Amérique latine où le gouvernement, en décrétant que la liberté de la presse doit être « conforme aux objectifs de la société socialiste », exerce un contrôle total sur l'information parvenant à la population, avance l'organisation Reporters sans frontières (RSF) dans un rapport consacré aux journalistes indépendants dans l'île communiste et rendu public mardi 12 septembre. Cuba est également, ajoute l'organisation au terme d'une mission d'une semaine sur place, « le seul pays de la région où des journalistes sont emprisonnés en raison de leur activité professionnelle ». Le rapport s'attache à comprendre la mécanique de la répression qui touche les journalistes indépendants et sort de l'anonymat les principales victimes de cette répression. Si cinq journalistes ont été jugés et condamnés à des peines de prison depuis 1997, actuellement, trois d'entre eux sont toujours détenus. Il s'agit de Bernardo Arévalo, Jesus Joel Diaz Hernandez et Manuel Antonio Gonzalez Castellanos, accusés d'« outrage » ou de « dangerosité sociale ». Le chef d'inculpation le plus souvent retenu contre les journalistes non officiels est l'« association illicite », inexorable puisque les autorités refusent toutes les demandes de légalisation de leurs statuts. Parmi les inculpés, José Edel Garcia Diaz est en attente d'être jugé pour cinq délits : « outrage, association illicite, collaboration avec l'ennemi, diffusion de nouvelles fausses et espionnage ». Oswaldo de Céspedes, ancien médecin des hôpitaux, est accusé depuis 1995 d'« association illicite » et de « propagande ennemie ». Le rapport détaille avec minutie le harcèlement dont font l'objet les journalistes indépendants dans l'exercice de leur fonction. Pour maintenir le monopole de l'information d'Etat, les autorités utilisent aussi bien la répression pure et dure que l'isolement social des journalistes indépendants pour les pousser à l'exil. Quatorze d'entre eux ont quitté l'île en 1999 et dix-neuf depuis début 2000. Ils avaient été dix-sept seulement, entre 1993 et 1998, d'après les données que RSF a pu collecter. Dans ce panorama assez noir, l'organisation relève que malgré toutes les difficultés il y a une augmentation sensible de leur nombre. « La multiplication des sites Internet diffusant leurs articles et la reconnaissance dont ils ont bénéficié lors du sommet ibéro-américain de La Havane démontrent, selon RSF, qu'ils ont gagné un espace grâce à la mobilisation internationale. » En conclusion, RSF demande aux pays membres de l'Union européenne et aux pays du groupe Afrique, Caraïbe et Pacifique (ACP) d'« intervenir auprès des autorités cubaines en faveur de la légalisation des agences de presse ». L'organisation recommande également à la presse des pays démocratiques de collaborer avec les journalistes indépendants, notamment en publiant leurs articles. « Outre un soutien financier, une telle collaboration représenterait une reconnaissance de leur travail et permettrait de rompre l'isolement dans lequel ils sont confinés », conclut le rapport. Alain Abellard (Publié dans le Monde du mercredi 13 septembre 2000) Cuba, Harcèlement, exil, incarcération, RSF,
septembre 2000. Le rapport est disponible sur ce site (RSFcubai
et RSFindep) et sur le site de l'organisation
: www.rsf.fr
|