L'arrangeur, compositeur et chef d'orchestre cubain, Arturo " Chico"
O'Farrill, est mort mercredi 27 juin 2001 des suites d'une affection
intestinale. Né à La Havane le 28 octobre 1921, il allait sur ses
quatre-vingts ans.
Son fils Arturo Jr, compagnon de route de la bande de Carla Bley, est désormais
le chef de l'orchestre Chico O'Farrill. Sa nomination sans prix aux premiers
Grammys de la musique latine, pour Carambola (2000), récompensant très
symboliquement aussi Heart of a Legend (1999) et Pure Emotion (Milestones/Warner),
l'a comblé de joie. Il était de ces musiciens élégamment gominés à qui il
suffisait d'être nominé. Son authentique modestie donne un sens plein à une
carrière d'arrangeur, d'orchestrateur et de compositeur (y compris dans le
registre classique) qui commence aux côtés de Benny Goodman (Undercurrent
Blues), se poursuit par l'Afro Cuban Jazz Suite, réalisé à la
commande de Norman Granz (1950, avec Charlie Parker en soliste), et va de Count
Basie à Carl Tjader en passant par Clark Terry, Dizzy Gillespie (Manteca),
Art Farmer (Aztec Suite), Mario Bauza ou Gato Barbieri.
Quincy Jones, comme font les grands (on ne prête qu'aux riches), aura signé
pas mal de compositions écrites par Chico O'Farrill. Lequel n'y voyait pas
malice, plus heureux à la tête de troupes torrides dans les palaces de Mexico
où il séjourne deux ou trois ans. Dans les derniers temps, Wynton Marsalis le
convoque comme il avait su recruter Joe Henderson (1995, Trumpet Fantasy). Il
participe également à un album de David Bowie (Black Tie White Nose), mais
ce n'est pour lui rien d'autre que le métier, qu'il accomplira avec le même cœur
pour de petits " jingles"de télévision lucratifs
sur la côte Ouest. Il n'était et le disait qu'un Cubain de la bourgeoisie
blanche aux études classiques, assez fou des musiques noires pour opérer
personnellement un rapprochement, sans atteindre à la gloire de Machito. Peut-être
parce que de naître à La Havane de père irlandais et de mère cubaine
aux ascendances allemandes crée en vous une étrange complexion qui résume en
silence le siècle.
Francis Marmande