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Des candidats à l'exil occupent l'ambassade mexicaine à Cuba

 Les autorités castristes dénoncent une "grossière provocation" organisée depuis Miami
 

Saint-domingue de notre correspondant

Vingt et un jeunes Cubains voulant quitter l'île étaient toujours retranchés, jeudi 28 février, dans l'ambassade du Mexique à La Havane, dont ils avaient forcé l'entrée, la veille, à l'aide d'un autobus volé. Mercredi en fin de matinée, la rumeur a commencé à circuler, dans la capitale cubaine, que le Mexique était disposé à ouvrir ses portes à tous les Cubains qui le souhaiteraient. Plusieurs centaines de personnes avaient convergé vers l'ambassade. Peu avant dix heures du soir, un petit groupe de jeunes s'était emparé d'un autobus qui avait enfoncé les grilles de l'ambassade. Alors que la police dispersait violemment la foule et les journalistes à coups de matraque et à l'aide de bergers allemands, plusieurs des jeunes ayant pénétré dans les locaux se sont réfugiés sur le toit d'où ils ont scandé des slogans hostiles à Fidel Castro. Le dirigeant cubain a inspecté, tard dans la soirée, les abords de l'ambassade, où il a été acclamé par ses partisans membres des "brigades de réponse rapide", des groupes de choc utilisés contre les dissidents.

Le gouvernement cubain a accusé Radio Marti, une station financée par les Etats-Unis basée à Miami, d'avoir provoqué l'irruption "d'éléments antisociaux et du lumpen" dans l'ambassade du Mexique.

Dans une note officielle publiée jeudi matin, les autorités affirment que des propos tenus le 26 février à Miami par le ministre mexicain des affaires étrangères, Jorge Castañeda, ont été "cyniquement manipulés par la mal nommée Radio Marti".

Selon le quotidien de Miami Nuevo Herald, M. Castañeda avait affirmé, lors de l'inauguration du centre culturel mexicain, mardi 26 février, que "les portes de l'ambassade du Mexique à La Havane étaient ouvertes à tous les Cubains, tout comme le Mexique".

Selon la note officielle cubaine, ces propos diffusés à huit reprises, mercredi, par Radio Marti, représentaient un appel à l'occupation de l'ambassade du Mexique et une "grossière provocation ouvertement organisée depuis une station de radio officielle du gouvernement des Etats-Unis." Jeudi, le porte-parole du département d'Etat américain, Richard Boucher, a estimé que "les Cubains ne chercheraient pas à pénétrer dans les ambassades étrangères s'ils avaient la possibilité de choisir leur propre gouvernement" et que "la vraie solution serait un changement à Cuba".

De son côté, M. Castañeda a affirmé, sur une radio mexicaine, que les personnes retranchées dans l'ambassade ne sont pas des demandeurs d'asile. "Ils n'ont manifesté aucune motivation politique", a déclaré le ministre, ajoutant que son gouvernement allait leur demander "de quitter l'ambassade rapidement". Selon M. Castañeda, cet incident est le résultat "d'une petite provocation d'éléments radicaux de l'exil cubain de Miami". Le gouvernement mexicain a demandé aux autorités cubaines "un grand déploiement de forces pour éviter que cela ne se reproduise" et il ne se laissera pas entraîner "dans une croisade anticastriste", a ajouté M. Castañeda. Le président mexicain Vicente Fox s'était rendu à La Havane le 4 février. Il y avait notamment rencontré sept des principaux représentants de la dissidence.

Tout en rejetant l'utilisation de la force pour entrer dans les missions diplomatiques, le défenseur des droits de l'homme Elizardo Sanchez a appelé les autorités à rechercher "une solution négociée", soulignant que cet incident "exprimait le désespoir de la majorité des Cubains". Depuis Miami, plusieurs organisations de l'exil, dont la Fondation nationale cubano-américaine, ont demandé au gouvernement mexicain de ne pas livrer les occupants de l'ambassade aux autorités castristes et de garantir leur sortie de l'île.

En 1980, l'occupation de l'ambassade du Pérou par plusieurs centaines de Cubains avait provoqué l'exode de 125 000 personnes qui avaient gagné la Floride à partir du port de Mariel. En 1994, au plus dur de la "période spéciale" provoquée par l'effondrement du bloc socialiste, plusieurs ambassades, dont celle de Belgique, avaient été occupées. A nouveau Fidel Castro avait ouvert les portes, permettant l'exil de plus de 35 000 balseros.

 

Jean-Michel Caroit

Le Monde daté du 2 mars 2002


 
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