Dix mille Cubains demandent des élections libres
Saisissant le Parlement avec une pétition inédite, ils réclament des
libertés fondamentales qui mettraient à mal la dictature castriste. L'ancien
président américain Jimmy Carter est attendu dimanche à La Havane
Deux jours avant la visite de l'ancien président américain Jimmy Carter à
Cuba, un groupe de dissidents a remis, vendredi 10 mai, une pétition auprès
de l'Assemblée nationale cubaine. Ce texte, connu sous le nom de "projet
Varela", se fonde sur l'article 88 de la Constitution cubaine qui prévoit
que l'Assemblée nationale doit convoquer un référendum si elle reçoit une
demande dûment signée par au moins 10 000 électeurs. L'initiative déposée
par la dissidence demande l'organisation d'un référendum portant sur quatre thèmes :
la liberté d'expression et d'association ; le droit à créer des
entreprises privées ; la libération de tous les prisonniers politiques ;
l'adoption d'une nouvelle loi électorale permettent des élections libres et
transparentes. Le texte déposé a été signé par plus de 11 000 Cubains.
"Aujourd'hui s'ouvre une nouvelle phase de notre histoire, un moment
de réconciliation d'espérance, a déclaré à la presse étrangère, à la
sortie du Parlement cubain, le principal promoteur du projet, Oswaldo Paya,
accompagné d'autres dissidents. C'est une pétition du peuple." Il
a indiqué que les signatures avaient été recueillies dans des conditions
difficiles en raison de l'hostilité des forces de sécurité cubaines qui ont
multiplié les menaces et les mesures d'intimidation. L'année dernière, la
police secrète aurait même confisqué des documents portant plusieurs milliers
de signatures.
Le gouvernement de Fidel Castro, qui considère tous les dissidents comme "des
contre-révolutionnaires manipulés par les Etats-Unis", n'a pas réagi
au dépôt du projet, qu'il avait qualifié dans le passé comme "une
initiative vouée à l'échec". La force du "projet Varela"
est aussi de rassembler une opposition cubaine fragmentée et dispersée. "Je
suis d'accord avec cette initiative, c'est positif. Même s'il n'atteint pas son
but, c'est une étape en avant", a déclaré le dissident Vladimiro
Roca, libéré le 5 mai dernier après cinq années de prison.
L'initiative, la veille de la visite de l'ex-président américain, s'insère
dans une stratégie qui vise à impliquer davantage la communauté
internationale. Elle intervient après la récente condamnation de La Havane,
à la commission des droits de l'homme de l'ONU à Genève, et juste avant la réunion
de Madrid entre les pays de l'Amérique latine et l'Union européenne.
De son côté, cependant, Fidel Castro attend de Jimmy Carter une
condamnation de l'embargo que Washington maintient depuis octobre 1960,
comme l'avait fait le pape lors de sa visite historique en janvier 1998.
L'ancien président américain lui fera sans doute ce cadeau, parce qu'il a
toujours clairement pris position contre l'embargo et plaidé en faveur d'une amélioration
des relations entre les Etats-Unis et Cuba pour, selon l'expression des
partisans de cette stratégie, "porter le vers démocratique dans le
fruit totalitaire".
Alain Abellard
Le Monde daté du 12 mai 2002
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