UNE VINGTAINE de personnes étaient toujours détenues, jeudi 11 novembre, au terme d'une « des plus grandes vagues de répression politique » qu'ait connue Cuba, selon les termes d'Elizardo Sanchez, l'un des porte-parole de l'opposition interne au régime castriste. Ce durcissement du régime s'inscrit dans la préparation du sommet ibéro-américain qui doit réunir les chefs d'Etat de l'Espagne, du Portugal et ceux de l'Amérique latine à La Havane les 15 et 16 novembre.
Le roi d'Espagne Juan Carlos, les présidents vénézuélien et brésilien, Hugo Chavez et Fernando Henrique Cardoso, doivent participer à cette réunion, que boycotteront les chefs d'Etat argentin et chilien, Fernando de la Rua et Eduardo Frei. Le ministre cubain des affaires étrangères, Felipe Enrique Roque, a déclaré que les participants au sommet pourront rencontrer des dissidents s'ils le souhaitaient mais que toute « activité illégale » serait réprimée. Au total, quarante opposants ont été interpellés et ceux qui n'ont pas été maintenus en détention ont été assignés à résidence. Pour M. Sanchez, il y a « une certaine efferverscence dans les milieux dissidents, qui, d'une manière totalement pacifique, essaient d'exprimer leurs points de vue ».
« FLOTTILLE DE PROTESTATION » Dans la matinée du mercredi 10 novembre, plusieurs groupes avaient appelé à manifester dans un parc de La Havane, mais cette tentative a été rapidement étouffée. Des centaines de militants pro-castristes avaient organisé des bals et entouré les lieux de sonorisations diffusant des slogans à la gloire du régime et du sommet ibéro-américain. Les quelques personnes qui ont tenté de défendre des positions hostiles à Fidel Castro ont été prises à partie par la foule et remises à la police. Il semble que deux personnes aient été arrêtées.
Au cours d'une interview nocturne de presque huit heures avec des journalistes étrangers, Fidel Castro a déclaré jeudi que « personne ne jouit de l'impunité, ni en ce moment, ni en aucun autre ». « La révolution n'est pas l'otage du sommet », a-t-il ajouté. Pour le dirigeant cubain, la dissidence n'a pas l'appui « de la masse ouvrière ou paysanne ». Il s'agit de « micro-groupuscules », tolérés par le gouvernement, « ce qui ne veut pas dire qu'ils sont légalisés ».
M. Castro s'en est aussi pris à Bill Clinton. Le président américain avait déclaré qu'il s'était « plié en quatre pour tendre la main » au dirigeant cubain et que celui-ci avait « à chaque fois abattu des avions, tué des gens illégalement, ou les avait mis en prison ». Ces déclarations sont « mensongères » et M. Clinton fait preuve de « faiblesse » face aux pressions anticastristes, a estimé Fidel Castro. Celui-ci voudrait que le sommet ibéro-américain encourage l'émergence d'une alliance entre l'Amérique latine et l'Europe afin d'éviter que ces deux régions ne soient « dévorées » par les Etats-Unis.
Toujours dans la perspective du sommet, une organisation anticastriste basée à Miami a prévu la formation d'une « flottille de protestation » contre le régime cubain. Mais les garde-côtes américains ont refusé à l'organisation Mouvement démocratie l'autorisation de faire sortir l'un des deux bateaux qui devaient se diriger vers Cuba. L'organisation anticastriste espère faire appareiller un autre bateau qui serait escorté de deux avions. - (AFP, Reuters.)